jeudi 19 mars 2009

La condition humaine

Je dis les pierres et les scarabées.
Je dis les bûches et les tripes.
Je ne chante pas.
Je parle avec des fourrures dans la bouche.
Je parle dans le fruit sans en ouvrir l'écorce.
Je ne respire pas le parfum des violettes frissonnantes.
Je ne vomis pas une rivière de roses.
Je ne chante pas, non.
Je refuse de chanter.
Mais je prends avec mes lèvres
comme avec des doigts, et je laisse des traces
dans la chair déguisée en pâte.
Je dis qu'il y a des montagnes de réel
où nous devons nous frayer un chemin
(il ne s'agit pas de chanter et fuir).
Je dis qu'un boeuf est fort comme plusieurs hommes,
mais que beaucoup d'hommes unis sont forts comme un fleuve.
Une voile rassemble le souffle des multitudes
et se fait assez forte pour labourer un champ.
(Oui, pourquoi ne pas labourer avec une voile et le vent ?)
Le bluet se dresse électrique dans le champ de blé
et menace la moissonneuse comme la flamme d'une lampe à souder.
Une pierre ronde, bonne à jeter,
est un éclatant exemple de fermeté
et de force de caractère.
Or je ne chante pas,
je ne fais que dire ce qui est,
ou ce qui pourrait être,
ce qui sera, un jour !

Artur LUNDKVIST

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