jeudi 4 juin 2009

La pudeur

Repérée dans un mouvement des yeux qui se baissent, du sang qui rosit la peau, des mains qui protègent une partie du corps, la pudeur s’oppose au dévoilement brusque d’une région du corps comme à celui d’un sentiment, d’une idée ou d’un souvenir qui doit rester secret. Même s’il révèle l’intention de cacher, l’affect de la pudeur n’est pas intentionnel. Mouvement de la chair et de l’esprit, la pudeur surgit aux frontières du volontaire et de l’involontaire. Elle rend furtivement conscient ce qui ne l’était pas. Elle ne va pas sans trouble. Ce trouble est relatif à la crainte qu’apporte la révélation de ce qui devrait rester voilé. Et ce qui doit rester voilé est ce qui ne peut pas se dire entièrement. Cet impossible à tout dire relève de la vérité qui parle en l’homme : vérité d’une altérité originaire qui n’est jamais réductible à ce que l’homme peut en dire, mais aussi mensonge d’un dédoublement qui fait tomber l’homme sous le coup de son propre jugement ou du jugement des autres et que, par orgueil, pour offrir une image impeccable de lui-même, il doit dissimuler.

Denis VASSE, La chair envisagée, Paris, Seuil, 1988 & 2002.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Vos commentaires et/ou critiques seront les bienvenus dès lors qu'ils n'enfreindront pas les règles de la courtoisie ...

Le Ruisseau

    L ’ entendez-vous , l’entendez-vous   Le menu flot sur les cailloux ?   Il passe et court et glisse,  Et doucement dédie aux branches,...